Droit

La citadelle conserve ses fonctions militaires jusqu’à la Révolution. Elle sert temporairement de prison politique jusqu’à la fin de la Convention nationale puis devient une prison pénale. Le manque de place dans les prisons alentour et la création successive de différentes structures de réclusion pousse les magistrats municipaux à transformer la destination du fort qui subit plusieurs campagne de travaux. Du dépôt de mendicité à la maison centrale de détention, les changements de statut juridique du fort offrent une autre lecture de ce lieu de privation de liberté.

Dépôt de mendicité

Le décret impérial du 5 juillet 1808, prescrit la création de dépôts de mendicité dans chaque département français. Mendicité et vagabondage sont alors considérés comme des délits pouvant entraîner des peines correctionnelles selon l’article 269 du code pénal. « Tous mendiants ainsi transférés au dépôt, y seront écroués en vertu d’une décision du sous-préfet, constatant le fait de la mendicité : ils y seront retenus jusqu’à ce qu’ils soient rendus habiles à gagner leur vie par le travail, et au moins pendant un an. »1 Après quelques travaux, le dépôt du Gard ouvre dans la citadelle en novembre 1811.

A.N., F21/1883/1029, Nîmes (Gard), dépôt de mendicité à établir dans la citadelle: plans et coupe, n.s., 2 calques du 09-08-1810 et 2 autres n.d.©Archives nationales
A.N., F21/1883/1029, Nîmes (Gard), dépôt de mendicité à établir dans la citadelle: plans et coupe, n.s., 2 calques du 09-08-1810 et 2 autres n.d.©Archives nationales

Rapport Garrez du 5 août 1810 : « Faire dépôt de mendicité pour 200/230 mendiants dans la partie disponible de la citadelle, déjà occupée par des prisons et divers établissements militaires dont caserne conservée. Le Conseil jugea le projet admissible à condition que les eaux soient suffisantes, potables et pour gros services, que les malades soient admis aux hospices de la ville, que les services de boulangerie, buanderie et boucherie soient au-dehors ou par entreprise et que le magasin à poudre soit transféré ailleurs. »

> A lire : l’histoire de Louise Nicolas, mendiante de Sauve qui faisait partie des quarante- six mendiants de l’arrondissement du Vigan incarcérés au dépôt de mendicité le 18 novembre 1811 – Texte écrit en 2005 pour la Revue Cévennes-Magazine. JF Aupetitgendre.

Maison de correction

Dès janvier 1813, la citadelle est également déclarée maison de correction, faute de locaux adaptés dans le reste du Gard. L’arrêté du 20 octobre 1810 ouvre les maisons de correction principalement à des condamnés à des peines de correctionnelle de moins d’un an et aux mineurs. On y incarcère donc « […] les condamnés par voie de police correctionnelle, les détenus par voie de police administrative, les prisonniers pour dettes, les enfants à enfermer sur la demande de leur famille« 2.

Les détenus du dépôt de mendicité et de la maison de correction sont alors surveillés par les mêmes employés, ils sont soumis au même régime et à la même peine.

Maison centrale de détention

En mars 1820, alors que les trois maisons centrales de détention de la région sont surpeuplées (Montpellier, Embrun et Riom), le dépôt de mendicité et la maison de correction de Nîmes sont supprimés et le Conseil général du Gard transforme la citadelle en Maison centrale de détention. Elle devient alors une prison pénale conformément à la réforme du système pénitentiaire édifiée par l’Assemblée Constituante de 1789.

Avec l’élaboration de la Déclaration fondamentale des droits de l’Homme, une profonde réflexion a été menée sur l’humanisation des lieux d’enfermement. Les révolutionnaires imposent, entre autres, la fin de la torture, la présomption d’innocence… La Révolution pose les grands principes du Droit et de la Justice moderne. Une large rénovation est entreprise par Napoléon Bonaparte à qui l’on doit le Code civil ou Code Napoléon (1804), le Code de procédure civile (1806), le Code de commerce (1807), le Code d’instruction criminelle (1808) et le Code pénal (1810). Ces fondements ne subissent pas de profonds changements jusqu’en 1958 avec l’arrivée au pouvoir de Charles de Gaulle.

Maison centrale de Nîmes : Cour d'honneur après mutinerie et incendie. - [S.l.] : [S.n.], 1974. ©ENAP
Maison centrale de Nîmes : Cour d’honneur après mutinerie et incendie. – [S.l.] : [S.n.], 1974. ©ENAP
Un épisode marque l’histoire de la Maison centrale durant l’été 19743. Un vent de révolte souffle des prisons des quatre coins du pays pour dénoncer l’inhumanité du système carcéral. Des mutineries, des grèves ou encore de simples occupations, sont menées par les prisonniers de Toul (54) à Nîmes au début des années 704. La maison centrale de Nîmes est partiellement incendiée le 20 juillet 1974 et certains bâtiments détruits. Cette vague de contestation qui fait la une des journaux et émeut l’opinion publique initie la réforme pénitentiaire dite « Lecanuet ». Elle crée par décret les centres de détention et les quartiers de haute sécurité, développe la libération conditionnelle et le sursis avec mise à l’épreuve.

La maison centrale de Nîmes ferme ses portes le 3 juin 1991.

Site universitaire Vauban

Le Centre Universitaire de Formation et de Recherche, qui succède aux antennes des universités montpelliéraines, installe son siège administratif sur le site Vauban en 2002. Il verra par la suite la création de l’université de Nîmes par le décrêt N°2007-733 du 7 mai 2007 et l’adoption de ses statuts définitifs avec le décrêt n°2012-614 du 30 avril 2012.

Les formations en Droit figurent parmi les premières disciplines enseignées à l’ouverture du site universitaire Vauban en 1995. Elles donnent une résonance particulière aux cours dispensés dans ce lieu.

Références :

1. Lettres de création du dépôt de mendicité du département du Gard

2. Consulter le document du CAUE du Gard Le Fort de Nîmes ou le défi de transformer une forteresse en université – Quelques pistes pour la classe – avril 2010

3. « Les mutineries de l’été 1974 et la réforme de 1975 » site Criminocorpus

4. « Ils ont eu le courage de dire « non » : les détenus en révolte durant l’été 1974″ par Mathieu Lépine