Le projet de reconversion du fort en site universitaire aurait pu faire l’objet d’une étude du Master Design Innovation et Société dispensé aujourd’hui à l’université de Nîmes en mettant au centre de la réflexion l’expérience de l’usager afin qu’il s’approprie lui-même ce nouveau lieu de vie.
Lors de la transformation de la prison en site universitaire, Andrea Bruno va d’abord s’attacher à l’esthétique du site en relevant un double défi : celui de créer un nouveau lieu de vie étudiante, à la fois respectueux du passé et ouvert sur la ville.
Une citadelle dans la lignée de Vauban
Le projet de citadelle militaire a été confié à Jean-François Ferry, ingénieur du roi Louis XIV. Il propose en 1687 une construction dans la lignée des réalisations de Vauban.
« Ce projet prévoit la construction d’une citadelle carrée à quatre bastions d’angle, un front réservé à l’artillerie percé de 33 embrasures à canons et tourné sur la ville. Les trois autres fronts sont tournés vers l’extérieur et destinés à la mousqueterie. La citadelle est entourée de fossés secs taillés dans le roc, d’un large chemin couvert et de quatre places d’armes sortantes dont deux sont reliées par des ponts-levis aux portes de la citadelle. Deux corps de garde extérieurs surveillent l’accès aux portes. L’entrée est surmontée d’un autre corps de garde. À l’intérieur, une grande caserne allongée coupe en deux le corps de place. La partie nord de la citadelle abrite une caserne plus petite, les logis de l’état major, la prison et l’église (détruite). À l’est et à l’ouest, deux pavillons abritent les appartements respectifs du commandant et du major. »1
L’ingénieur du roi apportera sa touche personnelle à l’édifice en dotant la porte d’entrée principale d’une œuvre stéréotomique représentant une coquille Saint-Jacques.
D’autres détails montrent le soin apporté à la construction : éperon d’escarpe (ouvrage en saillie et en pointe servant d’appui), cordon d’escarpe (moulure sur la partie haute de l’escarpe). La pierre utilisée provenait des carrières de Nîmes (Barutel) et de Beaucaire.2
La reconversion du fort
Après la fermeture de la prison, la Ville de Nîmes rachète le fort au ministère de la Justice. A l’issue de deux phases de sélection, c’est l’équipe de l’architecte italien Andrea Bruno qui sort lauréate du concours d’architecture organisé par la Région en août 1991. Il propose un projet ouvert sur la ville, respectueux du site et de son histoire et comprenant des ajouts contemporains réversibles.
Ce défi d’architecture Andrea Bruno l’avait déjà relevé avec la forteresse de Corte en Corse (musée et université), le musée des Arts et Métiers de Paris, le réaménagement du château de Rivoli à Turin, ou l’extension de la chapelle des Brigittines à Bruxelles…
Avec cette reconversion, son intention était de rendre de nouveau visible la forme originale de la forteresse, de gommer les occupations successives du site, la mémoire douloureuse et de rendre plus lisible l’architecture du lieu. Il restaure ou reconstruit les bâtiments détruits avec le même gabarit, crée de nouvelles structures qui s’intègrent parfaitement au lieu (amphithéâtres, bibliothèque universitaire), libère et ouvre les espaces (jardins, pinède, brèche dans la muraille) et crée de nouvelles circulations horizontales (voie continue depuis l’entrée principale jusqu’à la pinède) et verticales (structures métalliques accueillant les escaliers glissés entre les bâtiments).
> « Fort Vauban à Nîmes, le défi d’Andrea Bruno » – Les Cahiers de l’Urbanisme N°65 – septembre 2007
> Plaquette Vauban, l’Université au cœur de Nîmes, Service communication de la ville de Nîmes, 1995
> Société d’histoire moderne et contemporaine de Nîmes, Le Fort de Nîmes, De la citadelle à l’Université, « Quand un fort devient une université » Andrea Bruno p 151-161 colloque de Nîmes, 20-21 janvier 1995
Références :
1. Les fortifications de Vauban en France – Nîmes – Centre de ressources pour la gestion du patrimoine fortifié
2. Consulter le document du CAUE du Gard Le Fort de Nîmes ou le défi de transformer une forteresse en université – Quelques pistes pour la classe – avril 2010